« Mon parcours universitaire et professionnel est marqué par un profond engagement en faveur de la justice sociale en éducation », explique la professeure Soares.
« Au Brésil, mes études en administration des affaires et mon travail au sein d’organisations communautaires m’ont amenée à remettre en question la manière dont le monde fonctionne et à attirer l’attention sur les inégalités sociales. Cette réflexion m’a inspirée à poursuivre des recherches en sociologie et en éducation pour mieux comprendre la société et contribuer à provoquer un changement social positif », ajoute-t-elle.
L’hémisphère Sud rencontre l’hémisphère Nord
La professeure Soares raconte comment l’adaptation à la vie dans un nouveau pays comporte son lot de moments malaisants, voire troublants. Elle s’est souvent demandé si la langue ou son accent en étaient la cause.
« Lorsque j’ai quitté le Brésil pour le Canada, j’ai découvert que j’étais immigrante », explique-t-elle.
« C’est comme si j’avais changé de couleur après être montée dans l’avion. Au Brésil, je suis blanche, mais pas ici. Honnêtement, je ne savais pas que ce que ça signifiait d’être originaire d’un pays du Sud. »
« Lorsque j’ai immigré au Canada, j’ai été confrontée aux mêmes défis que les autres personnes nouvellement arrivées, particulièrement celles qui ne parlent pas la langue de leur pays d’accueil, ajoute-t-elle. Mon intérêt pour ces questions m’a amenée à étudier l’expérience des jeunes personnes immigrantes issues des minorités qui apprennent une nouvelle langue. »
Les défis de l’immigration chez les préadultes
De nombreux pays offrent des programmes d’éducation pour aider les personnes immigrantes à s’adapter à la société et à la culture de leur pays d’accueil. Au Canada, ces services d’accueil comprennent souvent un volet linguistique. Les recherches actuelles de la professeure Soares portent sur l’expérience des préadultes qui viennent d’arriver et participent à ces programmes – des jeunes qui, en plus de s’adapter à la vie dans un nouveau pays, apprennent une nouvelle langue.
Pourquoi étudier l’expérience des jeunes de 16 et 17 ans? « Plus les jeunes s’approchent de l’âge adulte, plus leur adaptation est difficile, explique la professeure Soares. Les élèves de ce groupe d’âge font face à des défis uniques, car ils n’ont pas toujours le temps de faire la transition entre les classes d’accueil et les classes ordinaires, ou de finir leurs études secondaires avant de passer à l’éducation aux adultes », ajoute-t-elle. Cette situation, qui survient à un moment critique de leur développement social, rend encore plus complexe l’expérience des personnes immigrantes à l’aube de l’âge adulte.
En se basant sur les recherches menées durant ses études postdoctorales à l’Université d’Ottawa, la professeure Soares explorera l’expérience des jeunes personnes immigrantes dans différents contextes linguistiques, comme au Québec, où le français est la langue majoritaire, et dans certaines communautés francophones de l’Ontario, où le français est la langue minoritaire. Les conclusions de ses études comparatives entre différents milieux scolaires pourraient permettre d’éclairer la prise de décision, de cerner les pratiques exemplaires et d’améliorer l’élaboration de programmes.
L’analyse de ces enjeux d’une perspective sociologique permet de réfléchir à la manière d’utiliser la théorie pour améliorer la pratique, remarque la professeure. Elle approche la recherche et la pédagogie en éducation d’un point de vue critique afin de mieux comprendre comment l’équité, la diversité, l’inclusion, la justice sociale et la décolonisation interagissent avec différents facteurs sociaux, comme l’immigration, la langue et l’origine ethnique.
Elle espère que son vécu d’immigrante aidera d’autres personnes nouvellement arrivées à voir ce qu’elles peuvent apporter à la société canadienne. « J’apporte mon identité à ce nouvel espace. Je ne suis pas née ici, je ne parle pas parfaitement l’anglais ni le français, et je ne connais pas la culture, dit-elle. Je suis encore en processus d’apprentissage, mais j’ai tout de même beaucoup à offrir en tant qu’immigrante. »
Discuter d’EDI en 2025
Nous vivons à une époque où il est compliqué de parler d’EDI. Entre le moment où la professeure Soares a déposé sa candidature au poste de professeure et aujourd’hui, le sujet est devenu source de tension, particulièrement pour les universitaires au sud de la frontière. Aujourd’hui, certains termes sont interdits, et on refuse de financer des projets sous prétexte qu’ils contiennent du vocabulaire supposément « controversé ». La professeure affirme : « Cette situation semble nouvelle, mais l’est-elle vraiment? Les termes changent constamment, mais les enjeux qu’ils représentent demeurent toujours aussi nécessaires. »
« Les titres des cours que je vais enseigner comprennent les expressions EDI, éducation inclusive et antiracisme. Mon travail est de discuter de ces enjeux avec les étudiantes et étudiants et de mener des recherches sur les questions qui découlent de ces sujets. Le problème, c’est que les inégalités existent toujours », explique la professeure Soares.
« Je crois qu’il est important d’adopter une position critique, même dans une période comme celle que nous traversons actuellement. En même temps, il faut être stratégique, car pour continuer nos travaux, il faut être encore là dans dix ans. »
« Je suis ravie de mon nouveau rôle de professeure à la Faculté d’éducation. J’ai hâte de collaborer avec différents partenaires du milieu de l’éducation afin de promouvoir l’équité, la diversité et l’inclusion, de débattre de ces notions et de continuer à travailler pour la véritable justice sociale. »
Mot de bienvenue
« Il m'est particulièrement agréable de souhaiter la bienvenue à la professeure Roberta de Oliveira Soares au sein de la Faculté. Son expertise dans le domaine de l'équité, de la diversité et de l'inclusion advient à une époque où ces considérations se trouvent plus que jamais au centre de nos préoccupations et de nos échanges intellectuels, » dit Francis Bangou, doyen de la Faculté d'éducation.
« Forte d'une expérience personnelle et d'un parcours académique substantiels en ce domaine, sa contribution ne manquera pas d'enrichir les conversations relatives à la justice sociale qui, comme elle l’explique, transcende les termes, » Il ajoute.
À propos de Roberta Soares
Roberta Soares est professeure adjointe en équité, diversité et inclusion (EDI) à la Faculté d’éducation. Elle a obtenu des diplômes de premier cycle en sciences sociales et en administration des affaires ainsi qu’une maîtrise en sociologie au Brésil. Après avoir terminé son doctorat en sciences de l’éducation à l’Université de Montréal, elle a fait un stage postdoctoral en sociologie à l’Université d’Ottawa, grâce au soutien du Fonds de recherche du Québec – Société et Culture (FRQSC). Parmi ses publications récentes, mentionnons Plans d’action Équité, Diversité et Inclusion (EDI) dans les universités québécoises : portrait et pistes de réflexions et d’action (2024) et Les récits de deux doctorantes immigrantes en éducation à Montréal : défis, stratégies personnelles et suggestions de mesures institutionnelles (2024).